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  Clinique Reliance
CLINIQUE RELIANCE / Pratiques intégratives de santé

148, Ave. de la Cathédrale, suite 5, Rimouski

Excusez-moi d'être malade !

4/19/2015

 
À travers ma pratique clinique comme psychologue auprès des personnes souffrant de douleurs chroniques et autres problèmes de santé physique, je reçois des confidences à propos de soins provenant d'autres professionnels de la santé issus tant des médecines alternatives et complémentaires (MAC) que de la médecine conventionnelle. J'aimerais vous faire part de ma réflexion quant à la culpabilité que ressentent des gens malades, culpabilité parfois amplifiée par le contact avec certains professionnels. Je vous partage ici les situations dont j'entends le plus souvent parler.

D'abord, clarifions une chose: personne n'est responsable de la culpabilité d'autrui. Néanmoins, pouvons-nous, comme professionnels de la santé, développer des compétences relationnelles qui favoriseraient chez nos patients davantage d'autocompassion que d'autocritique?

Toute personne qui consulte un professionnel de la santé se trouve en posture de vulnérabilité devant ce dernier, quel qu'il soit. Certains patients ont des attentes irréalistes à l'égard de leur praticien et projettent sur lui la toute puissance; ou encore, ils se déresponsabilisent de leur état et de leur rétablissement. On est souffrant, on veut une solution, une révélation, une réponse. Un réflexe normal lorsque l'on souffre est de chercher un sens à la maladie. Un sens, une explication physique ou psychologique, mais une explication... Cette recherche de sens, exacerbée par la posture de vulnérabilité du patient, conduit certains praticiens à des interprétations culpabilisantes des symptômes. Tant farfelues que rigoureuses, ces interprétations demeurent stigmatisantes.

Certaines MAC, par exemple, par une approche principalement psychosomatique, prétendent que toute maladie est issue d'un dérèglement émotionnel ou d'un conflit intrapsychique non résolu, à la source du développement de la maladie. «Réglez ce conflit et vous guérirez.  Vous n'y arrivez pas ? Vous manquez sans doute de motivation, de bonne foi, d'efficacité ou encore, vous ne voulez peut-être pas guérir?» Première situation qui laisse croire au patient qu'il devrait arriver à contrôler sa maladie et qui le met en échec, assurément !

Tout médecin, généraliste comme spécialiste, tente naturellement d'objectiver les symptômes et d'arriver à un diagnostic qui orientera le traitement. Si le patient souffre de symptômes atypiques, nébuleux et qui n'entrent pas dans les grilles diagnostiques et statistiques, s'il développe de l'anxiété à propos de ses symptômes et communique son inquiétude à son praticien à travers un discours détaillé, relevant toute observation faite de ses symptômes, il risque d'être étiqueté «hypocondriaque». Aux yeux du praticien, l'expérience symptomatique du patient semble peu crédible.  Et voilà que ce dernier vient de disqualifier son intervenant dans ses compétences diagnostiques.  La complexité à poser un diagnostic peut parfois laisser dans la personne du praticien un sentiment d'impuissance et aussi une culpabilité difficiles à tolérer. «L'hypocondrie» du patient lui sert alors à se déculpabiliser! «On ne vous inventera pas une maladie !» Cette situation peut se présenter avec les personnes aux prises avec des symptômes neuropathiques ambigüs ou, notamment, dans les cas de douleurs chroniques. Du coup, ce patient se retrouve seul avec ses symptômes et coupable d'en souffrir, que son tempérament anxieux y participe ou non.

Une attitude d'austérité, la recherche de pouvoir et le manque d'humilité peuvent être présents dans les deux médecines. À cela peut s'ajouter une maladresse, un manque de présence, de sensibilité et d'empathie, souvent explicable par un contexte de pression, d'urgence et de ressources limitées. Les deux situations ci-haut illustrées s'expliquent aussi, en partie, comme suit: d'une part, on peut constater une trop grande prise en compte de l'influence des émotions sur la santé par certaines médecines alternatives et complémentaires, le tout basé sur des croyances; d'autre part, du côté de la médecine conventionnelle, on semble encore malhabile à jongler avec la composante émotionnelle et avec la compréhension de son impact sur la santé physique.

Or, toute maladie est multifactorielle et devrait être prise dans son contexte psychosocial; les traitements devraient l'être aussi. L'alimentation, la gestion du stress et des émotions (incluant le traitement des traumas), la génétique, l'activité physique, le statut socioéconomique, le réseau social influencent l'état de santé. L'être humain dans toute sa complexité n'étant pas une machine, nous ne pouvons objectivement mesurer jusqu'à quel point, chez une personne donnée, chacune de ces composantes influence le développement de sa maladie, mais nous savons qu'elle l'influence, à des degrés divers. Aucune discipline ne peut prétendre avoir toutes les réponses. Comme praticiens et comme patients, nous devons apprendre à composer avec l'incertitude et à y naviguer de notre mieux. Il nous faut l'humilité d'admettre que l'on commence à peine à comprendre scientifiquement les mécanismes qui conduisent à la maladie et surtout ceux qui soutiennent la guérison. En même temps, de plus en plus de découvertes et de données probantes nous sont accessibles, sans pour autant être toujours prises en compte.


Bien que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) reconnaisse des déterminants sociaux de la santé, et malgré toutes les avancées scientifiques en neurosciences sociales et en psychoneuroimmunologie, le système de santé public et ses budgets au Québec sont, à mon sens, encore trop orientés sur une vision biomécanique et curative de la santé. Il y a encore beaucoup à faire avant d'en arriver à considérer la personne dans sa globalité et dans son contexte social. On ne peut nier l'efficacité de la médecine d'urgence (fractures, blessures, chirurgie, dépistage). Et les recherches sont en plein essor en matière de traitements de la douleur chronique. Un point qui, notamment, semble faire l'unanimité est la reconnaissance de l'importance de l'approche préventive, globale, multi-modale et collaborative du patient. Mais la peur, encore présente, de créer de faux espoirs et de culpabiliser empêche parfois les praticiens d'informer leurs patients sur ces dernières avancées scientifiques qui les responsabiliseraient sur leurs habitudes de vie et leur rétablissement (par exemple, en prescrivant uniquement un médicament à une personne dépressive qui vit avec un cancer et des douleurs, au lieu de lui prescrire aussi une psychothérapie, un groupe de soutien ou l'auto-hypnose et de lui parler des bienfaits désormais reconnus scientifiquement de ces disciplines). On est ici dans l'autre pôle: en craignant de culpabiliser le patient si on lui suggère une certaine responsabilité, une prise en charge possible de sa propre santé, on le prive de ressources documentées. Nous ne pouvons peut-être pas empêcher la culpabilité de surgir, mais nous ne devons pas non plus l'éviter. Si, comme intervenant, nous nous sentons dépassés par cette émotion chez le patient, le réflexe devrait être de le diriger vers un ou une psychologue pour aborder de front l'enjeu de la culpabilité.


En psychothérapie, on tente donc d'entendre cette émotion chez  les clients et de les aider à comprendre qu'ils ne sont pas coupables de leur maladie ou de leurs symptômes; qu'il y ait une forte composante psychologique ou non dans ces derniers. Personne n'a le plein contrôle de son corps ni de son esprit. Personne ne peut intégralement diriger son inconscient (qui régit l'ensemble des systèmes psychophysiologiques). Mais il est aujourd'hui démontré qu'une présence bienveillante et indulgente du praticien de santé, comme du patient face à lui-même, participe à une amélioration de son état de santé, de son rétablissement, sinon de sa qualité de vie.

En terminant, j'ajouterai qu'une des pires blessures psychologiques est de ne pas être reçu, entendu et cru. Que la deuxième, conséquente de la première, est d'être invalidé dans son vécu et que la troisième, qui marque le point final, est de se sentir culpabilisé. Cette expérience s'avère souvent éprouvante pour une personne en état de vulnérabilité qui ne demande que de l'aide.

 

Tony Fournier, psychologue de la santé



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    Tony Fournier accompagne des personnes affectées par des problématiques de santé physique depuis plus de 25 ans.

     

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